Je Reprend dans cette article l’histoire de mon projet depuis ses débuts, présentée de mon point de vue. Vous trouverez un article assez similaire sur le site de l’association Autonabee, association qui fait partie du réseau des Human Lab (ici, lien vers le site du premier human lab My human kit : celui de Rennes, fondé par Nicolas Huchet)
Yes You Canne, qu’est-ce que c’est ?
La rencontre entre une porteuse de projet en situation de handicap et une association du réseau des Human Lab qui lui donne les moyens de développer son idée.
Je m’appelle Hélène Guennec, j’ai 43 ans, une formation d’ingénieure, 2 enfants et je marche avec une canne depuis la naissance de ma file ainée en 2008.
En 2014, j’ai remarqué que cette canne était jolie mais que sa poignée s’abimait et me faisait mal à la main et je me suis demandée si d’autres personnes rencontraient ce même problème et si on pouvait faire quelque chose pour améliorer les choses.
Puis j’ai trouvé un nouveau travail en tant que développeur web et je n’ai plus eu de temps à consacrer à cette question. Mais elle trottait toujours dans ma tête et j’en ai parlé à un formateur, Jérôme Manin, qui s’intéressait à l’impression 3d et m’a dit « On doit pouvoir faire ça avec des matériaux souples ». Il m’a présenté l’organisme de formation f3df, qui commençait justement à formaliser et développer des formations dans ce domaine.
En 2016, je fais un premier séjour à l’hôpital Henry Gabriel, j’observe les autres patients dont certains marchent aussi avec une canne, ou 2, mais je suis plus concentrée sur la rédaction de mon mémoire de fin de formation de développeur web que sur cette idée de protection de poignée de canne.
Fin 2017, mon contrat s’est fini et je décide de suivre mon idée et de voir si je peux la concrétiser. Pour cela, j’ai suivi le conseil de Jérôme :
Quand on a une idée, mais qu’on ne sait pas comment faire, on en parle, on se forme, on s’entoure et on passe à l’action.
En 2018, je me suis donc formée chez F3df à la modélisation et à l’impression 3d, puis à l’entrepreneuriat et au parcours d’innovation avec l’association l’Arche-Aux-Innovateurs, ce qui m’a donner le courage de m’inscrire à la formation concours Lyon Startup.
Mon projet, alors appelé CréaZébra, a fait parti des 50 projets demi-finalistes.
Il n’est pas aller plus loin parce que je n’ai pas oser aller voir des potentiels utilisateurs. J’ai bien essayé d’en parler à l’animatrice du foyer à Henry Gabriel, et aux médecins qui m’y suivent depuis mon premier séjour en 2016, mais sans beaucoup de résultats. Je ne suis pas encore assez sûre de ce que je peux leur offrir et l’utilisation de l’impression 3d n’est pas encore à l’ordre du jour à l’hôpital.
En 2019, je m’ installe dans un espace de Coworking pour passer la certification utilisateur Autodesk Fusion 360 et faire mes premières expériences avec ma propre imprimante 3d, une Alphawise U30.
Je participe aussi à une semaine de prototypage à la préfabrique de l’innovation à St-Etienne, la Winter Innovation Lab, semaine pendant laquelle j’ai pu faire réaliser le scan de ma poignée de canne.
Cette année- là, je commence la rédaction d’un blog, ce blog, pour partager mes rêves et ma vision du handicap : https://www.lanalinotte.fr
Après toutes ses avancées, j’ai quand même pu constater que ce n’était pas évident de garder la motivation et de continuer à avancer quand on est seule.
Pourquoi je n’habite plus à Rennes, où s’est créer le premier Human Lab ?
Fin 2019 et début 2020, mon projet est donc déjà en perte de vitesse quand arrive la pandémie. Mais grâce à H’Up entrepreneurs, je bénéficie malgré tout d’un accompagnement par une coach qui me fait m’interroger sur mes motivations profondes et je me reconnecte à mes plaisirs d’enfance : le dessin, les couleurs, la création. C’est ça que je veux apporter : du fun malgré tout, malgré le handicap et la maladie, pour continuer à avancer.
Je profite donc de la pause de ce début d’année 2020 pour me former au coaching et à l’art-thérapie, quelque chose qui m’a déjà fait beaucoup de bien à une autre période compliquée de ma vie, ce qui me permet à nouveau de m’évader en cette année où nous avons tous étés enfermés.
Pendant cette période, je lance un compte Instagram, @lanalinotte, pour partager mes dessins, continuer à affiner mon projet et le faire connaitre.
Je continue malgré tout à penser à mon projet : au printemps, je me dis que ce doit aussi être faisable en tissu et j’essaie avec un bout de velours qui vient d’un pyjama de mon fils et deux bouts de chiffon. J’en parle avec une couturière du quartier, qui propose de faire des masques en tissu et elle me dit qu’elle fait déjà ce genre de manchon de canne pour des personnes en EHPAD, avec les mêmes tissus qu’elle utilise pour les masques. Elle m’en fabrique 1 en tissu rouge.
Fin 2020, pour retrouver de l’élan, je participe au parcours Shake You et travaille sur un projet en lien avec l’éducation. Ça fait du bien de se retrouver dans une ambiance de travail et d’émulation et de creuser de nouveaux domaines : les intelligences atypiques, le Design Thinking, les méthodes d’apprentissage en mode projet..
Début 2021 m’apporte plusieurs bonnes surprises :
Pour commencer l’année, je rencontre sur Instagram une entreprise qui réalise des orthèses en matériaux souples : design_otho3d et je leur confie mon idée. Julia me fabrique 4 exemplaires de manchons de canne en TPU, le matériau dont m’avait parlé Jérôme Manin, 6 ans plus tôt, à partir du scan de ma poigne de canne fait à St-Etienne en 2019, et elle me les envoie à ma nouvelle adresse.
Le même jour, juste avant la St-Valentin, j’emménage dans mon nouvel appartement et je reçois la concrétisation de mon idée. C’est donc possible et je vais pouvoir tester et faire tester mon idée.
Mais comment continuer ?
Quelque temps plus tard, je rencontre sur Linkedin Cécile Pacoret, qui vient de lancer l’association Autonabee, association qui fait partie du réseau de Human Lab !
Mon projet a trouvé sa ruche !
L’affiche des permanences Autonabee
A partir de là, je ne suis plus seule, et ça fait un bien fou. Cécile est enseignante-chercheuse et confie mon idée (et plusieurs autres de l’association) à des étudiants en design de l’école Strate. Ils imaginent la création d’un concept store de cannes en kit, où chacun pourrait customiser son aide à la marche selon son humeur et ses activités du moment.
Elle me donne aussi l’envie et le courage de participer au Hacking Health Lyon début 2022. Elle me met en relation avec tout un réseau de makers aux grands cœurs qui y participent avec moi et ensemble nous remportons le prix coup de cœur du Jury ! C’est à partir de ce jour-là que « mon » projet est devenu «notre » projet et s’est appelé «Yes You Canne » .
Par la suite, nous avons présenté ce projet et l’association à Henry Gabriel, où l’équipe d’ergothérapeutes s’intéresse de plus en plus à l’impression 3d et à ce qu’on peut faire avec pour les personnes en situation de handicap.
Pendant un nouveau séjour que j’y fais en avril 2022, nous y installons un mini-fablab pendant une demi-journée. C’est le début de la collaboration entre l’association et les équipes d’ergothérapie et d’animation de l’hôpital.
Puis nous participons au salon Handica, en juin.
Puis d’autres étudiants de l’école Polyvia travaillent sur l’idée de faire des poignées de canne plus confortables, et pour finir, l’Arche-aux-Innovateurs nous propose de proposer ce thème à la nouvelle équipe 46 :
« les aides à la marche pour les adultes »,
ce qui débouche à nouveau sur une super-idée : Twin Cane, une paire de bâtons de marche ergonomiques qui s’assemblent pour n’en former plus qu’un et libérer une main ou même les 2 en cas de besoin.
Voilà, c’est tout ça Yes You Canne, une question, des rencontres, des projets et de la fantaisie. Et ce n’est pas fini ! Il a déjà donné envie à plusieurs personnes de nous rejoindre et de réaliser leur propre projet d’adaptation, et de nouveaux groupes d’étudiants vont bientôt rejoindre l’aventure et donner leurs propres idées pour poursuivre cette aventure.
Parce que finalement, c’est ça que j’aime, dans ce projet : les rencontres et le faire-ensemble, qui permettent à chacun d’apprendre et de grandir.
J’ai hâte de voir ce que 2023 nous réserve !
7 ans de projet,
7 ans de protos
Et encore tant à découvrir et imaginer ensemble !
Et